2          2.1 Rappel sur la formation des éléments simples
                      
2.1.1 Rappel sur les éléments subatomiques
                       
           
2.1.1.1  Quarks, neutrons, protons, électrons

                                              Étymologiquement, atome signifie « qui ne peut être scindé ». Ce mot d’origine grecque, imaginé par Démocrite d'Adbère au Vème siècle avant Jésus Christ  est sensé désigner la plus petite partie d’un élément, une sorte de quanta de matière. Admis de l’antiquité jusqu’aux débuts du 20ème siècle, cette conception de la matière a été battue en brèche avec l’avènement de la physique quantique dont un des principaux enseignements est que, si il existe bien des quantas de matière et d’énergie (les deux étant liés), c’est à un niveau plus bas que l’atome qu’il faut les rechercher. D’abord imaginé comme un noyau central, composé de neutrons et de protons autour duquel gravite des électrons (atome de Bohr), il a été démontré que le proton et le neutron eux mêmes sont composés d’éléments plus petits encore, les quarks; l’électron restant, dans l’état actuel de nos connaissances, indivisible. Ces quarks sont au nombre de deux pour la matière ordinaire, désignés « U » et « D » pour up et down. Chaque particule est composée de trois quarks: un U et deux D pour le neutron, un D et deux U pour le proton. Les quarks ne peuvent être isolés et n'existent que combinés entre eux pour former des particules. Il en découle, la charge du neutron étant 0 et celle du proton +1 que les quarks possèdent des charges fractionnaires: +2/3 pour le U et -1/3 pour le D. L’électron ayant pour charge -1, un atome, qui est neutre, se doit de posséder autant d’électrons en orbite que de protons dans le noyau (On prendra comme description l'atome de Bohr qui, si il n'est que peu conforme à la réalité, est facile à imaginer). Ce nombre de protons est appelé numéro atomique. La somme protons + neutrons est appelée masse atomique.

                                              En schématisant, il y a donc, entre autres, dans cette famille deux quarks (U et D) et un électron. Ils composent la matière ordinaire selon des modalités développées au chapitre 2.1.1.2. Deux autres « familles » existent, qui seront évoquées en 5.2, « les physiques exotiques ».

                                               2.1.1.2 Définition d’un atome par rapport à sa composition physique (N et P)

                                               L’atome est donc formé d’un noyau, composé de neutrons et de protons, et d’électrons orbitant autour. Le nombre de protons est égal au nombre d’électrons pour respecter la neutralité de l’atome, et ce nombre est appelé numéro atomique. Un élément se distinguera d’un autre par son numéro atomique. Ainsi, un proton (et un électron) sera appelé hydrogène (numéro atomique 1). Le 2 sera de l’hélium, le 3 du lithium et ainsi de suite. le 6 sera le carbone, le 8 l’oxygène, le 26 le fer, jusqu’au dernier élément naturel ,l’uranium, de numéro 92. Il suffit donc de changer le nombre de protons d’un atome pour en changer les propriétés et la nature. C’est la fameuse « transmutation », Graal des alchimiste du moyen âge. C’est possible de nos jours, mais à l'aide d’appareillages dont le coût, la technologie et la complexité dépassent de loin les possibilités de cette époque. De plus, d’un point de vue économique, qui était le principal moteur de ces recherches de transmutation de plomb en or, le bilan est catastrophique !

                                               On peut noter à ce niveau que le nombre de protons détermine la nature du composé (propriétés physiques), le nombre d’électrons (qui  est le même), les propriétés chimiques. Le nombre de neutrons influe peu sur ces caractéristiques. Il ne fait qu’augmenter la masse atomique de l ’élément, en formant alors des « isotopes », de même propriétés, mais de masses atomiques différentes. Par contre, l’élément considéré peut être totalement « déstabilisé » par cet ajout ou ce retrait, et tend à retrouver un état stable en émettant soit des électrons (radioactivité bêta), soit un ensemble 2 neutrons + 2 protons (radioactivité alpha), soit de l’énergie sous forme de rayons très pénétrants (radioactivité gamma), les autres types de radio activités sortant du cadre de cet exposé (bêta+ en particulier).  C'est au milieu du XIXéme siècle qu'un moine russe, Dimtri Mendeleïev, comparant les propriétés chimiques des corps connus à cette époque eut l'idée de les rassembler en un tableau, alignant dans des colonnes les éléments aux propriétés identiques. Il réalisa ainsi  le fameux "tableau de Mendeleïev". Les cases restées vides furent comblées au cours des années suivantes, au fur et à mesure que les éléments y correspondant étaient découverts.

                                              NB : si le nombre d’électrons est différent du nombre de protons, l’atome n’est plus neutre. Il est chargé positivement si un électron part (perdant une charge de -1 : -(-1) =+1, et négatif si il en gagne un. Ces atomes chargés sont appelés « ions ».

                        2.1.2 Big bang et formation de H et He

                                                A l’origine de l’univers est l’énergie pure. Le "Big Bang" est souvent vu comme une sorte d'explosion titanesque. En fait, il s'agit d'une création. A cet instant, l'espace est créé, ainsi que le temps, et la physique ne peut représenter cet évènement qui est une singularité. On commence à imaginer l'univers au temps de Planck, soit 10-43 seconde après. L'univers est alors une soupe de particules dans laquelle se créent et s'annihilent sans cesse les quarks et les antiquarks.  Vient ensuite, entre 10-35 et 10-32 seconde, la très théorique période de l'inflation, au cours de laquelle l'univers enfle soudainement et multiplie son diamètre par un facteur de 1050 (1 suivi de 50 zéro !). Après 10-6 seconde, apparaissent les premiers protons et neutrons, formés par l'association de trois quarks qui après trois minutes peuvent se lier entre eux pour donner naissance aux premiers atomes. Il s'agit d'atomes légers, hydrogène, hélium et lithium.  L'univers continue toujours à se dilater et à se refroidir jusqu'à environ 300.000 années après le big bang où matière et rayonnement se découplent. Il devient alors transparent et  commence vers un milliard d'années la formation des galaxies et des étoiles, énormes usines à atomes, qui de ces trois éléments primordiaux vont donner naissance à tous les éléments lourds dont nous sommes constitués.

                        2.1.3 Étoiles et formation des éléments lourds

                               Nous voici donc en présence d’un univers dans lequel prédominent l’hydrogène, et dans une moindre part l’hélium. Cet univers est très chaud et devrait être homogène. Cependant, de part et d’autre, des molécules d’hydrogène vont se condenser, formant une zone de plus grande densité qui elle même va attirer les molécules aux alentours et ainsi peu à peu former une masse importante de gaz qui, sous l’action des forces gravitationnelles qu’elle engendre en son sein va s’effondrer sur elle même. Cet effondrement va avoir pour conséquence d’augmenter au centre de cette masse la gravité et la température, jusqu’à ce que s’y initient des réactions de fusion nucléaire entre les atomes d’hydrogène et d’hélium. Une étoile est née. Ces réactions, très énergétiques (de même nature que celles qui se produisent au sein d’une bombe H) vont produire une force radiative centrifuge qui va équilibrer la force centripète de gravitation. L’effondrement gravitationnel va alors cesser et l’étoile entre dans une période stable (appelée phase stationnaire ou séquence principale).

ABONDANCE COSMIQUE DES ELEMENTS

ELMT. ABONDANCE ELMT. ABONDANCE ELMT. ABONDANCE ELMT. ABONDANCE ELMT. ABONDANCE
H 3,18 x 1010 Ar 1,17 x 1005 Ti 2,77 x 1003 Ga 4,8 x 1001 Y 4,8
He 2,21 x 1009 Al 8,5 x 1004 F 2,45 x 1003 Kr 4,68 x 1001 Ba 4,8
O 2,17 x 1007 Ca 7,21 x 1004 Co 2,21 x 1003 Sc 3,5 x 1001 Mo 4,0
C 1,18 x 1007 Na 6,0 x 1004 Zn 1,24 x 1003 Zr 2,8 x 1001 Pb 4,0
N 3,74 x 1006 Ni 4,80 x 1004 Cu 5,40 x 1002 Sr 2,69 x 1001 Sn 3,6
Ne 3,44 x 1006 Cr 1,27 x 1004 B 3,50 x 1002 Br 1,35 x 1001 Ru 1,9
Mg 1,06 x 1006 P 9,60 x 1003 V 2,62 x 1002 As 6,6 Cd 1,48
Si 1,00 x 1006 Mn 9,30 x 1003 Ge 1,15 x 1002 Te 6,42 Nb 1,4
Fe 8,3 x 1005 Cl 5,70 x 1003 Se 6,72 x 1001 Rb 5,88 Pt 1,4
S 5,0 x 1005 K 4,20 x 1003 Li 4,95 x 1001 Xe 5,38 Pd 1,3

Ce tableau traduit l'abondance moyenne des 100 éléments les plus répandus de l'univers. Il permet de retracer l'histoire du système solaire par comparaison avec les quantités d'éléments réellement présents.

                                On s’est longtemps logiquement demandé pourquoi, l’univers primordial étant homogène, des étoiles et des galaxies pouvaient y naître. En effet, l’initiation de tout phénomène d’accrétion nécessite un point de densité supérieure à la densité moyenne. Dans un univers parfaitement homogène, toutes les molécules sont statistiquement équidistantes les unes des autres et dès lors, aucune direction et aucun point de l’espace ne peuvent être privilégiés pour donner naissance à un processus de condensation gravitationnelle. La réponse à cette énigme a été donnée en deux temps, et d’une manière tout à fait fortuite. D’une part, la découverte du « rayonnement 3K » ( appelé aussi rayonnement fossile) en 1965 par Arno Penzias et Robert Wilson qui remarquèrent, en réglant une antenne, la persistance d’une émission parasite. Après élimination de toutes les causes possibles, ils en déduirent que ce rayonnement, correspondant à une température de 3° kelvin, était en fait le résidu du rayonnement originel de l’univers trouvant son origine lorsque, 300.000 ans après le big bang, les photons et la matière se découplant, l'univers devint transparent  (la température y était alors de 3000°K). Ce rayonnement avait « refroidi » durant 15 milliards d’années pour atteindre aujourd’hui la température de 3°K (-269°C). Étudiant cette longueur d’onde, on observait donc un fantôme d’univers primordial, avant la création des grandes structures que sont les galaxies. La satellite cobe fut dévolu à cette étude et on put constater à l’examen des informations qu’il nous fit parvenir que l’univers primordial, contrairement aux modèles mais en accord avec l’observation du monde contemporain, était bien inhomogène, et renfermait donc en sa structure les prémices de l’architecture de l’univers actuel.

                                Revenons à notre étoile. Elle brûle de l’hydrogène et de l’hélium. En fait, elle fusionne les noyaux de ces atomes en noyaux d’atomes plus lourds. Ainsi, de l’hydrogène à un proton et de l’hélium à deux protons, vont naître des éléments de masses atomiques plus élevées (voir le tableau de Mendeleïev). Vont ainsi naître de l’azote, de l’oxygène, du carbone, etc... Suivant la masse de l’étoile, cette phase d’équilibre va durer plus ou moins longtemps. Une grosse étoile, au coeur de laquelle la pression est très élevée, et par conséquence la température, va brûler ses carburants bien plus vite (quelques millions d'années) qu’une petite étoile (plusieurs milliards d'années) et briller d'autant plus intensément (la luminosité varie comme le cube de la masse, soit comme la puissance neuvième du rayon). Lorsque tout l’hydrogène et tout l’hélium ont disparu, l’équilibre cesse et la pression interne augmente, ce qui a pour conséquence d’augmenter le diamètre de l’astre ( l'étoile passe alors par un stade dit de "géante rouge", car sa température superficielle diminue) et d’initier d’autres réactions de fusion nucléaires utilisant non plus les gaz légers mais les éléments précédemment formés comme carburants. Ainsi, de la fusion du carbone, oxygène, azote vont naître des éléments encore plus lourds comme les métaux, le soufre, jusqu’au dernier élément naturel non synthétique : l’uranium. Ensuite, et suivant sa masse, l'étoile connaît trois destins différents:
           1-  Sa masse est inférieure à environ 1,5 masse solaire (limite de Chandrasekhar, une masse solaire = 2 x 1030 kg) et l'étoile se contracte en une naine blanche qui se refroidira plusieurs milliards d'années durant.
            2- Sa masse est comprise entre 1,5 et 3 masses solaires et après s'être dilatée en géante rouge, l'étoile se contracte brusquement, explose et éjecte dans l'espace les éléments qu'elle a synthétisés (cette explosion impressionnante a souvent été observée dans l'histoire où elle marqua les imaginations. C'est une supernova). Le cœur résiduel se condense en une matière effondrée sur elle même de densité énorme,  ou les électrons et les protons se sont unis pour former l'unique constituant du corps, les neutrons. De plus, conservant le moment cinétique de l'étoile qui l'a générée, mais de diamètre très faible, l'étoile à neutron tourne très vite et très régulièrement sur elle même, émettant des rayonnements métronomiques. C'est un pulsar.
            3- La masse est supérieure à 3 masses solaires, et après être passée par le stade supernova, l'étoile se contracte également, mais encore plus drastiquement que dans le cas précédent, et devient un trou noir, singularité physique de densité infinie et possédant une vitesse de libération supérieure à celle de la lumière, ce qui le rend invisible par nature. On ne peut repérer ces trous noirs que par les rayons X et gamma de très forte énergie émis par les gaz qu'ils capturent dans leur énorme champ gravitationnel.  

                                Nous voici dans un univers ou tous les éléments nécessaires à l'apparition de la vie sont présents. De l'hydrogène qui se condensant va former une nouvelle étoile, et des éléments lourds qui formeront les planètes, les composés prébiotiques, et les organismes vivants. Sans les étoiles, l'univers serait resté une bulle d'hydrogène. Nous sommes donc issus des produits stellaires, des "poussières d'étoiles" comme le dit Hubert Reeves dans l'ouvrage du même nom.    

 2.2 De l’atome au cristal et à la molécule

                        2.2.1. Les cristaux

                        Les métaux et de nombreuses molécules s'agencent en forme de cristal. La structure microscopique d'un cristal fait apparaître un réseau d'atomes ou de groupes d'atomes placés aux noeuds d'un réseau tridimensionnel. La structure du réseau cristallin  microscopique est souvent visible à l'échelle macroscopique (ex le chlorure de sodium ou sel de cuisine NaCl), mais c'est la diffraction par rayons X qui met le mieux en évidence cette architecture. D'autre part, la structure du cristal n'est pas typique d'un élément. Ainsi, le carbone peut cristalliser sous diverses formes, du graphite au diamant, ou au fullerène, gros cristal récemment découvert et auquel la capacité à encapsuler d'autres molécules plus petites promet un avenir en microbiologie et en pharmacologie.

Le schéma ci-dessous énumère quelques formes de maillons cristallins, comportant respectivement 4, 6, 8, 12 et 20 faces. (Cliquer sur "fill" pour colorer les faces)

Polyhedres
par le
Dr. Mohan Noone

(Mars 2000)

      

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